Date de péremption dépassée : je mange ou je jette ?

« Les yaourts sont périmés, je les jette ? », « Il reste une tranche de jambon, poubelle ? », « Est-ce risqué de manger cette conserve dont la date est dépassée depuis plusieurs semaines ? » On se pose régulièrement ces questions au moment de préparer le repas, ce qui conduit de nombreux aliments à finir leur vie dans la poubelle plutôt que dans notre estomac. Pourtant, avec quelques notions en matière de dates de péremption des aliments, une part importante de ce gaspillage alimentaire peut être évitée sans pour autant prendre de risque pour notre santé.

DLC et DDM : maîtrisez le langage des dates de péremption !

Plus de la moitié du gaspillage alimentaire dans le monde se produit au niveau du consommateur final^1,2. Mieux comprendre les dates de péremption fait partie des leviers pour lutter contre le gaspillage. En Europe, elles sont obligatoires sur l’étiquetage des denrées alimentaires en application d’un règlement européen³. Elles sont fixées par les fabricants et sous leur responsabilité. On en distingue deux types^4,5 :

• Elle est indiquée sur l’étiquette via la mention « à consommer jusqu’au… »
• Elle s’applique aux denrées très périssables : charcuterie, poisson, viande, produits traiteurs frais, certains produits laitiers frais.
• Avec la DLC, on ne plaisante pas ! Consommer un produit alimentaire dont la date est dépassée peut présenter un risque microbiologique pour la santé humaine. Les produits porteurs d’une DLC ne peuvent d’ailleurs pas être commercialisés une fois la date dépassée.
• Les populations fragiles (personnes âgées, immunodéprimées, femmes enceintes et enfants en bas âge) doivent être particulièrement vigilantes au respect des DLC car le risque sanitaire encouru est plus élevé pour ces populations.

• Elle figure sur l’étiquette via la mention « à consommer de préférence avant le … » parfois précédée de « pour une dégustation optimale ». Il peut même être explicitement indiqué que le produit peut être consommé après la date⁶.
• Elle s’applique aux produits d’épicerie secs, stérilisés ou déshydratés (tels que café, conserves, biscuits, riz, lait UHT, pâtes), aux produits surgelés ou aux matières grasses (beurre, huile, margarine).
• Au-delà de cette date, le produit peut changer d’aspect (texture, couleur) et son goût peut être altéré, mais il ne présente pas de risque pour la santé. Autrement dit, votre biscotte pourra être un peu ramollo ou votre chocolat un peu blanchâtre mais vous pouvez les consommer sans souci !
• Pour consommer un produit après sa DDM, soyez néanmoins vigilant à l’altération éventuelle de l’emballage, à toute odeur désagréable ou couleur anormale.

Vous ne trouvez aucune date sur votre vinaigre ou votre paquet de sucre ? C’est possible aussi : les fruits et légumes frais, les boissons alcoolisées, les vinaigres, les sels de cuisine, les sucres solides ou encore les chewing-gums sont exemptés d’afficher une date de péremption³.

Une date rien que pour « œufs » !

Les œufs bénéficient d’une date sur-mesure : la Date de Consommation Recommandée ou DCR^7,8. Jusqu’à cette date (28 jours après la ponte), ils sont considérés comme frais. Plus on se rapproche de la DCR, plus leur temps de cuisson devra être long afin d’assurer la destruction des bactéries pathogènes qui pourraient se développer avec le temps.

Passé cette date, un test simple permet de savoir si un œuf est toujours consommable. Mettez-le délicatement dans un récipient rempli d’eau. S’il coule, il est encore consommable. En revanche, s’il flotte, mieux vaut le jeter car la formation de la poche d’air responsable de la flottaison de l’œuf s’accompagne aussi d’une baisse d’efficacité des défenses antimicrobiennes de l’œuf qui peut se contaminer^9,10. Vous risqueriez en effet une intoxication alimentaire, notamment aux salmonelles, bactéries responsables du nombre le plus élevé de foyers d’infection dus aux œufs en Europe¹¹. Si cette méthode semble assez fiable, elle ne fait cependant pas l’objet de recommandation officielle : il est donc préférable dans tous les cas de bien cuire les œufs dont la date est dépassée afin d’éliminer les bactéries.

Conserves et surgelés : encore bons même après des années

Les conserves peuvent être consommées des années après la date de péremption, à condition qu’elles soient en bon état. En revanche, si la conserve est bombée ou rouillée, que son contenu présente une odeur déplaisante ou un goût qui picote la langue, alors il est impératif de la jeter. En effet, cela pourrait être le signe d’une contamination par des micro-organismes, avec des risques tels que le botulisme par exemple^12,13,14.

De même, les produits surgelés sont encore consommables longtemps après la date à condition qu’ils soient restés congelés sans rupture de la chaîne du froid. En théorie, il n’existe pas de limite à la consommation des produits surgelés tant qu’ils demeurent bien congelés en continu puisque la température de congélation stoppe la multiplication bactérienne (mais elle ne tue pas les micro-organismes !). En revanche, le goût et l’aspect peuvent être altérés du fait de réactions chimiques^8,15.

Yaourt périmé ? Vérifiez avant de jeter !

En effet, il ne présente pas de risque microbiologique élevé en raison de son acidité et de sa grande quantité de ferments (bactéries lactiques) qui rendent difficile le développement des germes pathogènes. Il est d’ailleurs intéressant de noter qu’en Allemagne, en Espagne ou en Suède par exemple, les yaourts portent d’ailleurs une DDM et non une DLC¹⁶ ! En France, Danone a également fait le choix de passer progressivement de la mention « à consommer jusqu’au » à la mention « à consommer de préférence avant »¹⁷.

Mais attention : cette exception n’est valable que pour les yaourts et pas pour les desserts lactés !  La dénomination « yaourt » est officielle et est décrite dans un décret. Elle est réservée“ au “lait fermenté obtenu par le développement des seules bactéries lactiques dites Lactobacillus bulgaricus et Streptococcus thermophilus». Ce que nous appelons « yaourt » dans le langage commun parce qu’il contient du lait et est vendu en pot ne répond donc pas toujours à cette définition.

Il faudra donc malheureusement jeter votre mousse au chocolat préférée une fois la date dépassée.

Quelle durée de conservation après ouverture ?

Après ouverture, les dates de péremption ne sont plus valables. Il faut alors se référer aux recommandations de conservation après ouverture du fabricant : c’est ce qu’on appelle la durée de vie secondaire du produit. Voici quelques repères à avoir en tête :

Moisissures : peut-on couper la partie moisie et manger le reste ?

La moisissure est sournoise… Vous ne voyez que la pointe de l’iceberg mais elle peut se répandre en profondeur dans l’aliment. L’humidité et la chaleur favorisent leur développement. Certaines moisissures peuvent provoquer des réactions allergiques, des problèmes respiratoires ou même produire des toxines aux effets nocifs potentiellement graves²⁰. Ayez les bons réflexes selon l’aliment concerné^21,22 :

• Les fruits mous (pêches, tomate ou, fruits rouges) doivent être jetés lorsqu’ils présentent des moisissures car ils forment un milieu humide dans lequel les champignons peuvent pénétrer en profondeur. 
• Pour vos fruits et légumes durs (carottes, choux ou poivrons), coupez 2,5 cm autour de la zone moisie et consommez le reste²³.

• Ceux à pâte molle ou frais (camembert, reblochon ou bûche de chèvre) sont à jeter dès lors qu’ils commencent à avoir des moisissures
• Pour les fromages à pâte dure (emmental ou comté), vous pouvez couper 2,5 cm autour de la zone moisie et consommer le reste.

• A la poubelle !
• Ces aliments sont poreux et humides, et représentent un milieu idéal pour que les moisissures se développent en profondeur.

Quelques réflexes pour bien conserver ses aliments

Un certain nombre de produits doivent être conservés au réfrigérateur. Quelques gestes simples permettent de s’assurer de la bonne conservation des aliments, notamment le respect de la chaîne du froid, depuis le lieu d’achat jusqu’au retour à la maison²⁴.

• Ne les lavez pas car cela augmente la porosité de la coquille aux micro-organismes.
• Vous pouvez ensuite les conservez à température ambiante ou au frigo : le point le plus important est que la conservation se fasse à température constante car les variations de température favorisent le développement bactérien^25,26. Ainsi, quelle que soit l’option choisie, ne changez pas ensuite de méthode de conservation.
• Si vous les stockez à température ambiante, faites-le dans un endroit frais et sec. Au réfrigérateur, conservez-les dans la partie centrale plutôt que dans la porte car la température y fluctue davantage.

• Conservez-les dans un compartiment dédié pour éviter leur contact avec d’autres aliments, car ils sont potentiellement souillés.
• Conservez les salades, endives, champignons, carottes et radis dans le bac à légumes de votre réfrigérateur car ils apprécient le froid et l’humidité. 
• En revanche, stockez dans un endroit frais et sec les courges, pommes de terre, aubergines, tomates ou courgettes. En effet, avec le froid, ces légumes ramollissent, pourrissent et perdent leurs saveurs²⁷.
• La propreté du bac à légumes est par ailleurs essentielle à la conservation des fruits et légumes²⁸. Un environnement propre aide à maintenir la fraîcheur et prolonge la durée de vie de ces aliments.

• Certains fruits dégagent de l’éthylène et continuent à mûrir après la cueillette : abricots, pêches, poires, pommes, bananes ou encore avocats. Séparez-les des autres fruits (agrumes, fruits rouges, melon) car ces derniers risquent de se détériorer plus vite à leur contact.
• Le réfrigérateur n’est pas adapté à certains fruits qui se conservent mieux à température ambiante : bananes, mangues, fruits à noyaux (pêches, abricots, nectarines).
• Réservez le bac à légumes aux fruits déjà mûrs à point que vous ne pouvez pas consommer tout de suite et aux fruits rouges (fraises, framboises, mûres). Ces derniers sont particulièrement fragiles et sensibles à la pourriture et il est préférable de les consommer rapidement après l’achat.

• Débarrassez-la du jus qui peut contenir des micro-organismes mais ne la rincez jamais à l’eau, car cela peut encourager la propagation de bactéries à d’autres aliments via les éclaboussures d’eau^24,29,30 !
• Si votre viande vient de chez le boucher, conservez-la dans le papier paraffiné du boucher : il s’agit d’un type de papier qui a été traité avec de la paraffine, une sorte de cire, pour le rendre résistant à l’eau et à la graisse.
• Sinon, conservez votre viande dans une boîte hermétique à l’endroit le plus froid de votre réfrigérateur³¹. Privilégiez les boîtes hermétiques en verre plutôt qu’en plastique, car le verre est non-poreux et imperméable, ce qui empêche les bactéries de s’y accrocher et de s’y développer. De plus, le verre résiste mieux aux taches et aux odeurs, ce qui contribue à une meilleure hygiène.

• Essuyez la chair avec un papier absorbant, mais ne rincez pas votre poisson^32,33.
• Conservez-le ensuite dans la partie la plus froide du réfrigérateur (voire dans le freezer), dans une boîte hermétique afin d’éviter la contamination d’autres aliments.
• La durée de conservation est très courte : 1 à 2 jours.

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Dans la mesure du possible, il préférable de séparer à des étages différents les aliments suivants dans le réfrigérateur :

• Oeufs et produits laitiers
• Viande et le poisson
• Fruits et légumes

En effet, ces différentes catégories d’aliments présentent des niveaux de contamination différents. Il est donc conseillé d’éviter par exemple que la viande et le poisson soient contaminés par les fruits et légumes ou les produits laitiers. 

Il est également conseillé d’ôter les suremballages des aliments (cartons autour des yaourts par exemple) afin d’éviter la contamination des aliments et du réfrigérateur par les micro-organismes qui peuvent se trouver sur ces cartons et plastiques³⁴.